Bien que Word soit l’outil de choix pour créer un large éventail de documents, les graphistes ne l’ont jamais pris au sérieux. L’un des inconvénients étant le manque de fonctionnalités pour manipuler les polices de caractères et ainsi produire des publications typographiquement acceptables.

Quelques nouvelles fonctionnalités et le support de l'OpenType ont changé la donne. Cependant, personne ne semble être au courant de ces fonctions, notamment parce que dans Word, aucune de ces remarquables fonctionnalités n'est définie par défaut. La raison en est que le texte des documents plus anciens peut commencer à changer lorsqu'il est ouvert dans une version récente de Word.

La plupart de ces fonctions sont accessibles dans l'onglet "Paramètres Avancés" ("Advanced") de la boîte de dialogue des polices (fonts).

Kerning

Le kerning/crénage est une composante de toutes les polices conçues par des professionnels. Il définit la distance entre chaque paire de glyphes (caractères) possible dans une police.

Pourquoi aurions-nous besoin de ces informations ? Sans crénage, l'espace entre chaque paire de caractères d'un mot peut sembler « optiquement » différent, bien qu'il soit « mathématiquement » identique. La cause réside dans les différentes formes des glyphes et dans l'interaction entre eux.

Comme vous pouvez le voir, l'espace entre les glyphes est égal sans crénage. Lorsque le crénage est utilisé, l'espace entre le « W » et le « o » est devenu un espace « négatif » ; ces deux glyphes se chevauchent légèrement.

Il existe une limitation au crénage : en dessous de 8 points pour la taille du texte, il n'est plus visible.

Ce système offre-t-il les mêmes contrôles de crénage que les applications professionnelles telles que Adobe suite ou Quark Express ? Non, dans InDesign, par exemple, le concepteur est en mesure d'annuler les informations de crénage telles que définies dans la police et d'apporter des modifications subtiles pour s'adapter à la configuration globale.

OpenType

Qu'est-ce que l'OpenType et pourquoi devrions-nous l'utiliser ? Faisons un bref tour d'horizon de l'histoire des caractères numériques, également connue sous le nom de « guerre des polices ».

Au début, c'était le chaos ; chaque application avait besoin de son propre pilote et de sa propre collection de polices pour chaque type d'imprimante. Cela a changé en 1984, lorsque plusieurs technologies se sont mises en place. L'Apple Macintosh avec son système d'exploitation unique permettant à toutes les applications qui s'y exécutent d'utiliser les mêmes pilotes et Adobe PostScript qui permettait d'utiliser un seul pilote pour imprimer sur n'importe quelle imprimante compatible PostScript. Cela signifiait également qu'un seul jeu de polices pouvait être utilisé. De ces deux types différents existaient : Les polices de type 1 produites uniquement par Adobe et les polices de type 3 pour lesquelles la technologie a été cédée sous licence à des fonderies de polices tierces.

Deux sociétés n'aimaient pas vraiment le quasi-monopole sur les polices PostScript détenu par Adobe et ont décidé de développer une technologie d'impression alternative. Apple et Microsoft ont réuni deux technologies, TrueImage, un RIP ou Raster Image Processor qui n'a jamais vraiment vu la lumière du jour, de Microsoft et TrueType d'Apple.

Le principal avantage de TrueType par rapport aux polices PostScript ? Le TrueType utilise les mêmes données pour représenter la police à l'écran ou pour l'imprimer. Cependant, le TrueType a rapidement acquis une mauvaise réputation, en particulier dans les environnements graphiques professionnels. L'une des raisons en est la prolifération rapide des polices TrueType, qui ne sont pas toutes de la même qualité. Par exemple, CorelDRAW, une application de dessin vectoriel sous Windows, permettait à tout utilisateur de créer ses propres polices, à partir de dessins réalisés dans l'application.

Les polices PostScript et TrueType étaient toutes deux très limitées ; elles ne pouvaient contenir que 256 caractères au maximum (256=28).

Entre alors en scène : l’OpenType. L’OpenType peut comprendre jusqu'à 65536 glyphes (65526=216). Cela permet à l’OpenType de contenir non seulement l'alphabet latin de base, mais aussi toutes les variations avec tous les accents sur toutes les lettres possibles. Avez-vous déjà entendu parler de l'ogonek ? Ce n'est pas un animal éteint mais une marque diacritique utilisée en polonais et incluse dans l’OpenType. Voici un A majuscule avec un ogonek : Ą.

Pas seulement l'alphabet latin... L'arabe, l'hébreu, le grec et le copte, le cyrillique, le chinois et d'autres types d'écriture peuvent être inclus dans une seule police. Les symboles et les dingbats aussi... Et les ligatures.

Caractéristiques OpenType — Les ligatures

L'union de deux ou plusieurs lettres dans un même glyphe donne lieu à une ligature. Une ligature courante est : fi.

D'autres ligatures courantes sont les « fl », « ffi », « ffl », etc. Et n'oublions pas les ligatures des mots français communs comme œuf et cœur.

Quelles ligatures - si elles sont disponibles dans la police - seront utilisées ? Outre « Aucune », Word permet quatre réglages différents :

Standard uniquement

Ce réglage permettra d'activer toutes les ligatures « standard » comme fi, ffi, ff, etc.

Standard et Contextuel

Ce réglage permet d'utiliser les ligatures standard plus quelques autres qui n’apparaîtront que dans un contexte spécifique. Par exemple, la combinaison « ae » ne se transformera en ligature que dans un mot où elle est nécessaire, comme « ægosome ».

Historique et discrétionnaire

Ce réglage est peut-être un peu surfait. Vous pourriez voir apparaître des ligatures comme « ct », « st »et bien d’autres encore.

Toutes

Toutes les ligatures, standard, contextuelles, historiques et discrétionnaires seront appliquées.

 

Caractéristiques OpenType — Espacement des chiffres

Les glyphes des nombres par défaut dans une police sont mono-space : chacun d'eux prend exactement la même largeur. Cela est utile pour mettre une série de chiffres dans une liste, car les différentes décimales sont assez correctement alignées. Cela contraste toutefois avec la plupart des polices où tous les autres glyphes, contrairement au texte créé à la machine à écrire, ont leur propre largeur, le "m" étant le plus large, le "I" étant le plus fin.

Dans le texte courant, le terme « proportionnel » doit être privilégié, dans les tableaux ou les listes, par exemple une liste de prix, le terme « tabulaire » devrait être privilégié.

Fonctionnalités OpenType — Aspect des chiffres

Par défaut les chiffres, tout comme les autres glyphes d'une police ont tous la même hauteur. Par contre grâce à l’OpenType, chaque fois qu'un nombre est utilisé dans un texte, par exemple une date, les chiffres sont mis en évidence.

Paramètres recommandés pour le texte standard : formes « à l'ancienne », combinées avec un espacement « proportionnel ».

Caractéristiques OpenType — Ensembles stylistiques

Certaines polices peuvent contenir plusieurs ensembles stylistiques offrant différentes variations sur une même police. La plupart des polices ne contiennent qu'un seul jeu, en théorie une police peut contenir jusqu'à 20 jeux. La Gabriola, une police par défaut fournie avec Windows, contient huit jeux différents.

Fonctionnalités OpenType — Alternances contextuelles

Certaines polices OpenType contiennent des variantes contextuelles. Cela signifie que pour certains glyphes, des formes alternatives existent. Ces alternatives seront utilisées en fonction du glyphe qui est utilisé juste après elles.

Nous pouvons facilement reconnaître les polices « manuscrites » comme n'étant pas vraiment manuscrites mais générées par ordinateur : chaque glyphe est toujours identique. Ce n'est pas le cas si des variantes contextuelles sont utilisées. Dans l'illustration ci-dessous, nous pouvons voir 4 formes différentes du « s » dans un seul mot. Cela donne à la police une apparence plus naturelle, plus « véritablement » manuscrite.

En général, même pour d'autres polices, il est recommandé d'activer l'option d'alternance contextuelle.

Conclusion

MS Word dispose de certaines fonctionnalités qui permettent à l'utilisateur de créer des textes bien mis en forme. Il est encore loin des options disponibles dans les applications professionnelles de graphisme et de mise en page comme Adobe suite ou Quark Express et autres, mais au moins il aura moins l'air amateur.

Il est toutefois dommage que la plupart des options soient désactivées par défaut, bien que cela puisse être nécessaire pour assurer la compatibilité avec les versions antérieures.